3 Minutes / 3 Questions dans les conditions du Direct avec Cédric Pemba-Marine, Maire du Port-Marly
Danièle Licata,
ZePros Territorial
24 avril 2025
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Zepros Territorial vous emmène chaque semaine avec France Climat à la rencontre d’un élu de France. Un format direct, rapide et percutant pour découvrir les défis, réussites et visions de femmes et d’hommes engagés. Invité cette semaine, Cédric Pemba-Marine, maire du Port-Marly et Vice-Président de la communauté d'agglomération Saint Germain Boucles de Seine. En 3 minutes chrono, il partage ses projets marquants, ses petites frustrations et ses grandes ambitions pour sa commune. Un échange sans détour, à ne pas manquer ! 

Quel est le projet dont vous êtes le plus fier ?
Deux projets me tiennent particulièrement à cœur. Le premier projet est né de la volonté de repenser notre rapport à la Seine. Comme beaucoup de villes, la nôtre s’était construite en tournant le dos au fleuve. Aujourd’hui, nous avons décidé de renouer avec cette dimension portuaire qui fait partie de notre identité. Le port de Port-Marly a été réaménagé en profondeur. Les berges, autrefois peu accessibles, boueuses et délaissées, sont devenues un véritable lieu de promenade, de rencontres, de respiration. C’est un espace vivant, partagé, où la biodiversité retrouve aussi sa place. Nous avons pris soin d’intégrer des dispositifs de phytoépuration pour les bateaux-logements. Cette reconquête des berges s’inscrit aussi dans une dynamique plus large puisque je représente notre communauté d’agglomération dans l’entente Axe Seine, un travail commun mené avec d’autres villes, de Rouen à Paris, en lien avec des élus comme Édouard Philippe, Anne Hidalgo ou Patrick Ollier.
Le second projet est d’un tout autre ordre, mais tout aussi symbolique à mes yeux : la transformation d’un ancien foyer en un lieu intergénérationnel. Ce bâtiment accueille aujourd’hui des événements, des ateliers, des repas partagés entre habitants… C’est devenu un vrai lieu de lien social. Par exemple, nos "Bien à table", ces dîners organisés plusieurs fois par an avec les habitants, permettent à des personnes qui vivaient à deux rues l’une de l’autre sans se parler de se découvrir, d’échanger. C’est cette proximité recréée, cette chaleur humaine retrouvée, qui fait toute la force de ce lieu.

Un projet vous laisse-t-il un goût d’inachevé ?
Oui, clairement. Il s’agit de la relation que nous essayons de reconstruire avec les bailleurs sociaux. Cela fait cinq ans que nous travaillons à resserrer les liens pour améliorer la qualité de vie des habitants, mais nous n’avons pas réussi à aller au bout de cette ambition. Le lien humain, fondamental, s’est distendu. Il y a quelques jours encore, je recevais un message de la directrice d’un des bailleurs qui reconnaissait, avec honnêteté, les manquements. À l’origine, les gardiens jouaient un rôle clé : présence, écoute, médiation. Aujourd’hui, dans un contexte de rationalisation des coûts, ces fonctions se sont effacées. Or ce lien humain est essentiel, c’est lui qui donne toute sa valeur au service public. C’est ma plus grande frustration : ne pas être parvenu à restaurer pleinement cette confiance et cette proximité.

Quels projets marqueront votre mandat ?
Ce que je retiendrai de mon mandat avant tout, c’est la richesse des rencontres humaines. J’ai découvert des parcours de vie bouleversants. Souvent, ce que les gens attendent, ce n’est pas une solution immédiate, mais simplement qu’on les écoute. Et ça change tout. Une écoute sincère peut suffire à ouvrir un espace, une perspective, un apaisement. J’ai souvenir d’une femme hébergée dans un hôtel de la commune, arrivée de Côte d’Ivoire après un parcours d’exil extrêmement douloureux. Elle ne pouvait même plus formuler un rêve, tant elle vivait dans l’urgence du lendemain. Nous avons pu lui permettre de se projeter, un peu. Ces histoires-là vous marquent pour toujours.
Elles disent aussi beaucoup de ce que devrait être l’action publique : un engagement pour la dignité, pour la reconnaissance, pour le lien. Même dans les situations les plus tendues – je pense à l’accueil de personnes précaires dans notre commune, imposé sans concertation par l’État – nous avons tenté de faire au mieux, avec humanité. Mais il faut que cela se fasse dans le respect des territoires, et pas contre eux.
Je suis un privilégier, j’ai eu de la chance. J’en suis conscient. C’est aussi pour cela que je veux redonner, transmettre, et ne pas oublier ce que ces vies invisibles ont à nous apprendre. Si j’ai un jour à écrire une histoire, ce sont aussi ces voix-là que je voudrais faire entendre.
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